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Les Carnets de Philippe Truong
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Les Carnets de Philippe Truong
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11 novembre 2007

Duong Phu Hiên, probablement le collectionneur d'antiquités le plus fortuné du Vietnam

071107_lacroix_histoires_mode32Inconnu du grand public, peu connu des spécialistes, Duong Phu Hiên, un officier à la retraite, est probablement le collectionneur d'antiquités le plus fortuné du Vietnam. Un homme discret, qui ouvre rarement la porte de son trésor…
Il vit dans une grande maison à 4 étages, qu'il considère pourtant comme "trop étroite". Il faut dire que son domicile ressemble moins à un lieu d'habitation qu'à un musée avec, de la cave au 4e étage, une accumulation impressionnante d'objets anciens. "Je n'accepte de montrer ma collection qu'aux personnes ayant suffisamment de connaissances pour en apprécier la valeur ou alors à celles dotées d'une sensibilité particulière à la beauté mystérieuse des antiquités", confie le collectionneur.

"Venez, je vous vais montrer une de mes collections, celle des céladons légers, un type de céramique dont le prix atteint des sommets", explique Duong Phu Hiên à notre groupe de journalistes qui, curieux de connaître sa "fortune sans pareille", est allé frapper à sa porte pour la énième fois. Sésame, ouvre-toi ! Et là, stupéfaction ! L'impression de rentrer dans un musée, mais d'une telle densité ! Des centaines de flacons d'alcools, de pots à chaux, de céramiques, des brûle-parfums, des vases et récipients divers... Et puis là, dans un coin, la fameuse collection de céladons légers. Au total 350 pièces, évaluées à plusieurs… millions de dollars. Pas étonnant que le vieux officier soit un peu méfiant et n'ouvre pas la porte au premier quidam qui passe ! Ces porcelaines, d'un émail bleu métallique extraordinaire, sont nées sous la dynastie chinoise des Tang (9e-12e siècles). Ensuite, les méthodes de fabrication sont parties à vau-l'eau… L'engouement pour ces céramiques est tel qu'elles sont devenues les antiquités les plus recherchées au monde et peut être les plus chères.
 

"Il semble que mon destin soit lié aux céladons légers !", déclare malicieusement Duong Phu Hiên, qui raconte ensuite sa première rencontre avec ces porcelaines : "C'est par hasard que j'en suis tombé amoureux, en 1972, alors que, jeune officier, j’étais envoyé en mission au Sud. Le chemin était long et pénible. À mi-distance, dans la ville de Vinh (Ndlr : province de Nghê An, au Centre), un événement particulier attira mon attention : sur le chantier d'un grand bâtiment, construit avec l'aide de spécialistes allemands, une multitude de pièces et fragments de céramiques avaient été exhumés. Après avoir pas mal insisté, on a consenti à me donner la moitié d'un bol cassé, à l'émail d'un bleu métallique d'une beauté inimaginable". La naissance d'une passion dévorante. À chaque fois qu'on lui signale une "bonne affaire" ici ou là, il part immédiatement, et ce quelle que soit la distance à couvrir.

Désignant du doigt un grand bol orné de fleurs de nénuphar, M. Phu Hiên révèle : "C'est le premier objet intact que j'ai acheté. C'était en 1987 à Kim Bôi, dans la province de Hoà Binh. Daté de la dynastie vietnamienne des Ly (11e-13e siècles), il m'a coûté 2.000 dollars. Il a même été présenté au Musée du Louvre, dans le cadre d'une exposition. Et là, plus d'un collectionneur étaient près à débourser 250.000 dollars pour l'acquérir !"

Fier d'être l'un des gardiens du patrimoine national
L'objet le plus précieux de sa collection de céladons légers est une coupe d'alcool du 9e siècle. Un petit objet de 5 cm de hauteur, 8 cm de diamètre à l'ouverture et 2,5 cm au pied. Bleue métallique à l'extérieur, cette coupe est dorée à l'intérieur, avec des dessins en relief de chrysanthèmes. "Une beauté indescriptible que l'on ne peut apprécier pleinement qu'en la touchant et la contemplant longuement!", s'exclame M. Phu Hiên. En début année, un collectionneur taiwanais s'est présenté, prêt à lui acheter cette merveille pour la bagatelle de plusieurs millions de dollars. Une fortune qu'il a refusée sans aucun regret. "Jamais je ne vendrais un tel objet, de valeur nationale". Ses 2 autres "objets de valeur nationale" sont un flacon d'alcool en forme de canard et un petit vase réservé aux cérémonies cultuelles, datant du 9e-12e siècle. "J'ai la chance de les avoir achetés l'an dernier, 100.000 dollars/ pièce. Alors que les experts de la revue +ASIA Art+ ont évalué les mêmes objets à 1-2 millions de dollars, poursuit le collectionneur. Cela signifie que notre pays possède un grand trésor de céramiques qui fait saliver bien des collectionneurs étrangers ! Et je suis fier d'en être l'un des gardiens".

Sa passion immodérée pour les antiquités, Duong Phu Hiên l'a héritée de ses aïeux. Son grand père était pratiquant de médecine orientale, et son père, enseignant. Des métiers nobles certes, mais insuffisants pour nourrir une famille nombreuse. "Ils étaient tellement fous d'antiquités qu'ils ont ramassé tout ce qui était ancien, même de petits fragments. Ils considéraient que la valeur d'un objet, même cassé, résidait dans son âge et dans la civilisation qu'il représentait. C'est le rôle des amoureux des antiquités de le déchiffrer et conserver ", raconte Phu Hiên. C'est dans cet environnement singulier qu'il a grandi, qu'il s'est cultivé et que son intérêt pour les "vieilles choses" a mûri. Il est maintenant membre de l'Association des antiquaires de Thang Long.

Outre ses collections de céramiques, le vieux officier possède aussi une centaine de statues de bouddhas, dont certaines en or pur venant du Tibet, des sculptures en bois d'aigle, des tambours de bronze, des manteaux royaux de l'époque des Qing (dynastie chinoise des 17e-18e siècles)…

À la question de savoir s’il a l'intention de présenter au grand public son trésor, le vieil homme esquisse un sourire : "Actuellement, notre Association des antiquaires de Thang Long se prépare activement à une exposition d'envergure en l'honneur du millénaire de la capitale Thang Long-Hanoi. Dans l'avenir, j'espère que nous puissions créer un musée digne de ce nom". (Nghia Dàn/CVN)

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